Phonorama, le site dédié aux phonographes à cylindres

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Henri Lioret et la phonétique expérimentale [Page 1/2]


En 1908, après une courte période de trois ans consacrée à la mise au point d’inventions éloignées du phonographe, Henri Lioret revient naturellement à des sujets de recherche plus proches de ses domaines de prédilection, l’enregistrement et la reproduction du son. Cette photographie le représente près de son Lioretgraphe transcripteur, destiné à enregistrer sur papier les sinuosités qui traduisent les différences de profondeur du sillon d'un cylindre de phonographe (Cosmos, 25 décembre 1910).

 

Le Lioretgraphe transcripteur ou Lioretgraphe n° 8 se compose essentiellement d’un phonographe et d’un transcripteur. La parole est gravée selon la méthode habituelle sur un cylindre (C) l’enregistreur est ensuite remplacé par un reproducteur comportant un saphir mousse placé à l’extrémité d’un système de leviers amplificateurs (L) dont les déplacements sont enregistrés sur un ruban de papier (P) enroulé sur un tambour (T).

 
 

Ce coffret contient le levier à deux branches du Lioretgraphe transcripteur (L sur la photographie précédente), permettant une grande amplification du tracé de la voix sur le papier, et le rabot pour effacer les cylindres de cire.

 

Au Laboratoire du Collège de France, l’abbé Rousselot, créateur de la Phonétique expérimentale, utilise divers dispositifs mécaniques pour l’inscription de la parole afin de montrer l’évolution de la prononciation conduisant à la langue moderne. Dans la continuité des travaux d’Etienne-Jules Marey, le phonéticien pratique la méthode graphique en traduisant en courbes et en mesurant les caractères du son dans les moindres vibrations inscrites : amplitude, période, phase, etc., jusqu’aux plus fins harmoniques du timbre. Il utilise le Lioretgraphe qu'il considère comme le meilleur des transcripteurs.

 

Exemples de transcriptions de voyelles sur papier enfumé, restituées par le Lioretgraphe n° 8. Dans une étape précédente, les voyelles ont été enregistrées sur le cylindre en cire d'un phonographe standard. Dès le début de la guerre, le Lioretgraphe est utilisé dans la rééducation de l’oreille des gueules cassées revenus du front, blessés à la tête ou assourdis par les mitrailleuses et atteints de surdité. Son utilisation se généralise dans les institutions pour l’éducation des sourds-muets. L’enregistrement sur le cylindre, puis la transcription amplifiée sur papier permettent au professeur de visualiser les défauts de prononciation et de procéder aux exercices visant à les atténuer.

 

En 1912, l’abbé Rousselot demande à Henri Lioret d’améliorer un appareil destiné à l’enregistrement des ondes sonores imaginé par le Docteur Struycken, résidant à Breda, aux Pays-Bas. Sur le principe, cette invention consiste à réaliser l’inscription instantanée de la voix ; elle n’est plus pré-enregistrée sur un cylindre, mais captée par une membrane. Grâce aux multiples perfectionnements apportés par Henri Lioret, cet oscillographe mécanique, construit et mis au point avec la caution scientifique du phonéticien, se révèle d’une grande sensibilité. Ses performances sont remarquables : en amplifiant jusqu’à 500 fois les vibrations de la membrane, il donne des images bien plus nettes que tous les clichés produits jusqu’alors. Il permet notamment d’impressionner un film photographique large de 2 cm sur une longueur de 100 m, à la vitesse de 1,20 m par seconde.

 

 

Le Lioretgraphe transcripteur utilisé à l'Institut de Phonétique de la Sorbonne après la guerre. Cet appareil figure actuellement dans les collections du Fonds Charles Cros de la Bibliothèque Nationale.

 
 
 

Catalogue des Nouveaux modèles de Lioretgraphe édité en 1909. Ce générique s'applique aux appareils appliqués à la Physique et à la Phonétique expérimentale. Rappelons que le nom Lioretgraph (sans e à la fin) désigne les phonographes Lioret construits entre 1899 à 1901.

Pour feuilleter ce catalogue ou son supplément, cliquez sur l'un des points rouges ci-contre.


 

Le catalogue des modèles de Lioretgraphe décrit principalement le Lioretgraph n° 8. Il propose toutefois d'autres appareils, tel ce dispositif d'inscription de la voix à distance, utilisant un phonographe et un téléphone de type Gaillard-Ducretet. Notons que le phonographe est un Bettini n°4 (Le Tandem) comportant une petite plaque Lioret, cependant la signature de Gianni Bettini habituellement gravée sur le coffret n’y figure pas, comme s’il s’agissait d’appareils inachevés. Afin d’éviter toute déformation du tracé, le mandrin Stentor légèrement tronconique a été remplacé par un tambour en aluminium de plus grande taille et de forme parfaitement cylindrique. Ces appareils proviennent de la liquidation des biens de la Société des Phonographes Bettini après sa faillite prononcée en octobre 1904.

 

Le Tandem (Bettini n° 4)  adapté  par Henri Lioret pour les travaux sur la phonétique en 1909 figure encore dans le Catalogue de Physique Générale Expérimentale de janvier 1931 du constructeur d'appareils de précision Deyrolle.
Il y est décrit comme suit : «Enregistreur phonétique à mouvement d'horlogerie avec charriot et support réglable permettant d'avoir la représentation graphique de la vitesse du débit dans la parole normale et des voyelles en vue de la rééducation de la parole chez les sourds-muets».
 

 

 

Cette lettre du 11 Mars 1912, signée par Henri Lioret, accompagnait l'envoi de son catalogue de Phonétique expérimentale à l'un de ses clients.

 
 

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